Type d'entrée : versement

Date d'entrée : 04/01/2020

Les innovations sont présentes dans tous les objets de notre vie quotidienne qu'il s'agisse d'ustensiles culinaires ou des objets . L'innovation est toujours une aventure qui part d'une idée et prend corps dans une réalité tangible. Elle peut être d'ordre technique ou social, connaître des ruptures, des échecs, voire nous échapper dans ses conséquences ou ses usages. Certes l'innovation répond à des besoins, plus ou moins explicites, mais elle peut également les créer, quitte à alimenter le cycle de consommation sans fin de nos société occidentales. En introduisant l'innovation dans les cuisines, les fabricants de petit électroménager renouvellent depuis un siècle nos pratiques culinaires. Le temps consacré aux tâches quotidiennes se réduit et s'adapte aux nouveaux rythmes de travail et aux modes de vie.

Moulinex à Alençon

Fondée en 1937 sur l'ancien site industriel du Moulin d'Ozé, l'usine Moulin Légumes connaît un formidable essor après la guerre. Au milieu des années cinquante, son fondateur Jean Mantelet choisit de produire essentiellement des ustensiles électriques. L'entreprise devient Moulinex. Diffusés sur les foires et dans les grands magasins, connus à travers une publicité inventive, les appareils Moulinex deviennent vite indispensables à toute la famille.

Forte de son succès la marque ouvre des usines dans toute la Normandie. Alençon reste le principal site de production : sur une superficie de presque 10 hectares en 1976, l'usine emploie 3922 ouvriers (1519 hommes, 1414 femmes). Devenue une marque internationale, l'entreprise implante des filiales à l'étranger. Affaiblie par la concurrence et des luttes de pouvoir, Moulinex connaît des graves difficultés à partir de 1990 qui ébranlent le monde financier et économique. Après le rachat par Seb, l'usine d'Alençon ferme en 2001, licenciant 1000 salariés.

 Dans la ville-berceau de la marque, la décision est attendue mais provoque un choc profond. Des mesures sont prises pour favoriser le retour à l'emploi alors que l'usine, fondée en 1937, est démantelée.

Afin de rassembler les documents relatifs à l'histoire de l'entreprise, les archives municipales lancent alors un programme de collecte et d'inventaire. Après le dépôt des archives de l'association Moulinex-Jean Mantelet, le service organise la collecte de témoignages oraux. 35 entretiens ont lieu. Le résultat : 50 heures d'enregistrement, dans lesquels les témoins ont livré leurs souvenirs, parlé de leur vie dans l'entreprise, évoqué le fondateur Jean Mantelet, les dirigeants et la fermeture.

En 2018, l'association Moulinex Jean Mantelet effectue un second don correspondant aux objets, outils et prototypes conçus ou utilisés par la société Moulinex.

Les photographies du magazine interne "Le point de Rencontre", 

La liste correspondant aux usines :

Alençon : Z

Falaise : M

Argentan : L

Donfront : W

Caen : J

Bayeux : G

Mamers  : T

Fresnay-sur-Sarthe : R

Saont-Lô : E

Granville : B

Mayenne : LL

Villaines : AA

conservation

Communicable

Monsieur Claude Renault, embauché chez Moulinex en 1968 à l'atelier d'outillage, évoque ses origines, sa formation professionnelle. Il parle de l'outillage, des évolutions du métier, des spécificités du personnel de l'atelier au sein de l'entreprise et de ses revendications syndicales. Il évoque la naissance de son engagement syndical, ses premières actions militantes au début des années 1970, son passage de la CGT à la CFDT. Il parle de la fonction et du travail de délégué syndical, de l'ambiance et des tensions dans le personnel, de l'obtention du local CFDT. Evocation de la grève de 1978. Il parle des rapports avec la direction. Il se souvient de son unique réunion en présence de Jean Mantelet et évoque sa personnalité. Il parle des premières difficultés rencontrées par l'entreprise dans les années 70-80, des brevets tombant dans le domaine publique, des débuts de la mondialisation, de l'organisation générale de l'entreprise, des « baronnies », de l'absence de stratégie directionnelle. Il parle des positions du syndicat. Il évoque l'arrêt et la reprise de son engagement syndical, le R.E.S. (Rachat de l'Entreprise par ses Salariés) en 1988-1989. Il raconte les pressions de la direction. Il parle des années 90, du rachat de Krups, de la mondialisation, des plans de restructuration, des positions de la CFDT. Evocation de l'organisation des différentes usines, des rapports et des divisions entre directions et entre syndicats. Il parle de la fermeture des usines d'Argentan et de Mamers, de l'année 2001, des possibles repreneurs, du redressement et de la liquidation judiciaires, du dépôt de bilan, de l'ambiance chez les salariés. Evocation du licenciement du personnel, de l'activité de délégué syndical pendant la fermeture, du rachat par Seb et du travail de délégué après le rachat. Il raconte la création de l'Association Moulinex Jean Mantelet (AMXJM) en 2002. Evocation du plan Amiante. Il parle de l'association REVIVRE, de la création et du montage de l'atelier d'insertion, du recyclage et de la réparation d'appareils électroménagers.

Monsieur Claude Renault, outilleur, délégué syndical CFDT, témoignage sur la grève de 1978 à Moulinex. Il rappelle le contexte des années précédant le mouvement, les différentes représentations syndicales. Il parle des revendications pour l'augmentation des salaires, de la situation économique de l'entreprise, de l'objectif d'obtenir un accord d'entreprise. Evocation des positions de la direction. Souvenirs des premiers débrayages, des débuts du mouvement, de la réunion intersyndicale pour l'ensemble des usines du groupe. Il raconte le blocage de l'usine d'Alençon et les réactions de la direction, l'ambiance générale. Il se souvient d'Alfred Sirven, futur directeur des Ressources Humaines de Moulinex. Evocation du Tribunal des Prud'hommes et des conditions de la négociation. Il parle de la perception de la grève par le personnel, des responsabilités syndicales, de la conduite de la grève et des bouleversements apportés par celle-ci. Evocation de ses engagements personnels. Il parle du contexte alençonnais et du milieu rural, des défilés [photographie 7], du rôle des femmes [photographie 8], des soutiens d'autres entreprises (Carrier). Souvenirs de son appel au maire d'Alençon, Pierre Mauger [photographie 10], de la présence des délégués syndicaux nationaux. Il parle de son rapport avec la hiérarchie, les politiques. Il raconte la tenue de la réunion en Préfecture avec la direction. Evocation de la présence des Renseignements Généraux, de « voyous » [photographies 4, 11 et 5], de l'arrivée des CRS [photographie 9] et du démontage des grilles de l'usine [photographie 12]. Il parle de l'après-midi suivant cette réunion, du refus du personnel de reprendre le travail. Evocation d'une seconde réunion à la Préfecture avec la direction, de l'élaboration d'un plan de négociation avec Alfred Sirven. Il parle des négociations et de la signature de l'accord d'entreprise. Evocation des changements apportés par le mouvement au niveau de la direction, des représentations syndicales, du rapport entre les salariés, de l'engagement des femmes. Evocation de l'expérience de la grève sur un plan personnel et familiale. Souvenirs de l'entrevue entre la direction et les autres représentants syndicaux pendant un week-end lors du mouvement. Il parle de ses convictions personnelles, de la « base », des positions face à la direction. Impressions personnelles devant la sélection de photographies.

Entretien réalisé au domicile du témoin.